Nous sommes en janvier 1875, à Paris. Tous les spectateurs sont installés, le concert peut commencer. Ils sont venus écouter la dernière création du compositeur Camille Saint-Saëns. Mais c’est la stupeur !

L’œuvre est un « poème symphonique », une musique pour orchestre inspirée d’un texte littéraire. Or, l’écrit sur lequel s’appuie Saint-Saëns parle d’une danse macabre. Ces danses, qui datent du Moyen Âge, miment la Mort qui entraîne les humains dans une grande farandole. Le sujet a de quoi faire froid dans le dos !

Et Saint-Saëns ne fait pas les choses à moitié. Comme souvent avec lui, tous les instruments ont un rôle. Les douze coups de minuit sont joués à la harpe. Les notes grinçantes du violon évoquent la Mort en personne. Tout est là pour créer un climat macabre, mais bizarrement joyeux. Puis la mélodie annonce l’arrivée des squelettes, et là, coup de théâtre ! Saint-Saëns a choisi de les personnifier grâce à un instrument très original : le xylophone. En frappant à l’aide de baguettes des lattes de bois, on obtient des notes sèches, courtes, qui rappellent le cliquetis des os…

C’est la surprise générale : cet instrument à percussion n’avait encore jamais fait partie d’un orchestre symphonique ! Ce choix est alors si peu conventionnel que Saint-Saëns préfère préciser sur la partition, à l’intention des futurs interprètes, l’adresse du magasin pour s’en procurer.

Et cette audace fait son petit effet : on réclame un bis ! L’œuvre devient un succès, immédiatement adaptée par d’autres compositeurs. Quant à Saint-Saëns, il n’hésitera pas à se parodier lui-même. Il réutilise l’air du xylophone dans une autre de ses célèbres compositions, Le Carnaval des animaux, dans la mélodie évoquant les vieux fossiles…

Voici une vidéo de cette œuvre (écrit en anglais mais les images et le son vous donneront un bel aperçu de toutes ces explications ) :